La vie littéraire. Troisième série
                        
                     
                                                         
                
                    La vie littéraire. Troisième série
                                            
                            By Anatole France
                            
                                22 May, 2020                            
                            
                         
                                        
                                                                        Par quel sort cruel devais-je aimer et admirer un critique qui correspond si peu à mes sentiments! Pour M. Ferdinand Brunetière, il y a simplement deux sortes de critiques, la subjective, qui est mauvaise et l'objective, qui est bonne. Selon lui, M
                                ... Read more
                                                Par quel sort cruel devais-je aimer et admirer un critique qui correspond si peu à mes sentiments! Pour M. Ferdinand Brunetière, il y a simplement deux sortes de critiques, la subjective, qui est mauvaise et l'objective, qui est bonne. Selon lui, M. Jules Lemaître, M. Paul Desjardins, et moi-même, nous sommes atteints de subjectivité, et c'est le pire des maux; car, de la subjectivité, on tombe dans l'illusion, dans la sensualité et dans la concupiscence, et l'on juge les oeuvres humaines par le plaisir qu'on en reçoit, ce qui est abominable. Car il ne faut pas se plaire à quelque ouvrage d'esprit avant de savoir si l'on a raison de s'y plaire; car, l'homme étant un animal raisonnable, il faut d'abord qu'il raisonne; car il est nécessaire d'avoir raison et il n'est pas nécessaire de trouver de l'agrément; car le propre de l'homme est de chercher à s'instruire par le moyen de la dialectique, lequel est infaillible; car on doit toujours mettre une vérité au bout d'un raisonnement, comme un noeud au bout d'une natte; car, sans cela, le raisonnement ne tiendrait pas, et il faut qu'il tienne; car on attache ensuite plusieurs raisonnements ensemble de manière à former un système indestructible, qui dure une dizaine d'années. Et c'est pourquoi la critique objective est la seule bonne. Less